2) Les moyens de fonctionnement

Les moyens de fonctionnement d'Ayda ont constitué un point primordial de l'association. On peut établir une différenciation entre les subventions des collectivités territoriales et les rentrées financières qu'Ayda a généré, par ces activités et les marques de sympathie qu'elle a occasionnées. Ce volet a pu être établi à partir notamment des bilans financiers contenus dans les archives. L'année 1997/1998 est manquante mais le rappel inscrit sur le bilan financier de 1999 nous permet d'avoir un aperçu de cette année.

 

 

a) Les subventions

Les collectivités territoriales, les institutions publiques, ont la possibilité dans le cadre de leurs prérogatives respectives d'apporter un soutien financier à des associations par le biais de subventions de fonctionnement ou bien de subventions de projets spécifiques. Ayda a sollicité leur aide dès sa création en 1994. La mairie de Toulouse a refusé, le Conseil Régional de Midi-pyrénées a refusé, seul le Conseil Général a octroyé une subvention.

Cette aide substantielle de 50 000 francs a été débloquée par les instances départementales dés le mois de juin 199532 . Elle a été reconduite chaque année jusqu'en 1998 et a fait l'objet d'une demande de renouvellement pour l'année 1999. Elle nécessite la constitution d'un dossier de demande à adresser au service chargé de ces questions au Conseil Général (rue du rempart St Etienne à Toulouse jusqu'en 1998 puis transféré dans les nouveaux locaux de l'assemblée départementale). L'association requérante doit adresser sa demande au président de Conseil Général. Le dossier est composé de deux parties, l'une concernant le côté financier et l'autre les activités propres.

La trésorière doit établir un compte de résultat de l'année écoulée (par année civile) et effectuer un budget prévisionnel justifiant la demande de subvention. Le secrétaire général quant à lui doit joindre, dans ce dossier, un bilan d'activité et présenter le programme à venir. Il est nécessaire d'y joindre une présentation de l'association et une lettre de la présidente sollicitant la subvention. Si la demande est déposée dans le courant du premier trimestre, le versement sur le compte s'effectue dans les meilleurs délais au cours du quatrième trimestre de la même année. Une convention est signée entre le président du Conseil Général et la présidente de l'association qui s'engage à utiliser l'argent débloqué dans le cadre des activités de son organisation. Un compte de résultat est demandé par les services financiers de l'assemblée départementale à la fin de l'année écoulée comme cela est prévu dans le cadre de la loi.

Cette demande de subvention a été soutenue auprès du Conseil Général par une personne dont le nom n'apparaît pas dans les archives de l'association. Il s'agit de Julien Jusforgues. Cet ancien libraire d'Ombres Blanches (rue Gambetta à Toulouse) est devenu directeur de cabinet de Pierre Izard, président du Conseil Général de Haute-Garonne. Ami de jeunesse de Georges Rivière notamment, il est membre du Parti Socialiste. Il a manifesté son soutien et sa solidarité à l'égard des exilés algériens en permettant à Ayda d'obtenir cette subvention capitale dans son développement. 

Ayda a sollicité une subvention exceptionnelle lors du projet de la caravane des associations démocratiques algériennes en France du 1er au 30 octobre 1998. Le Conseil Général a octroyé une aide d'un montant de 40 000 francs. Le Conseil Régional, ayant entre temps changé de majorité, a pour sa part était partenaire de ce projet et débloqué la somme de 30 000 francs. Le Ministère des Affaires Etrangères a financé cette opération à hauteur de 60 000 francs et Ayda a reçu une aide du Centre Culturel d'Alger s'élevant à 30 000 francs.

 Grâce au soutien du Conseil Général de la Haute-Garonne, Ayda a pu recevoir en cinq ans une aide financière de 250 000 francs.

 

b) Les cotisations, les recettes et les dons

 *Les cotisations

Ce volet du financement d'Ayda est aléatoire et difficile à prévoir d'une année sur l'autre. En travaillant à partir du fichier des adhérents, on peu établir de manière toutefois incertaine, que de 1994 à 1998 Ayda a drainé à peu prés 300 adhérents. Ces chiffres ont été confirmés par Mohamed Bahrour. Le montant de la cotisation avait été fixé en 1994 à 50 francs pour une simple adhésion et à 200 francs (minimum) pour une adhésion de soutien. Cette cotisation a été augmentée en 1995 passant de 50 francs à 100 francs. La générosité des membres s'est manifestée par la souscription de nombreuses adhésions de soutien, comme on peut le constater à la lecture de plusieurs coupons-réponses.

Les différents bilans financiers apportent une estimation approximative du montant de ces cotisations. En effet la ligne de compte dans les produits (ou recettes) correspondant aux produits de fonctionnement (adhésion) est commune avec les dons ce qui entraîne une impossibilité de prise en compte simple de ce montant. En 1994/1995 ce montant fusionné s'élève à 49 441,00 francs, pour l'année 1995/1996 la somme totale atteint 30 658,50 francs, en 1996/1997 elle se monte à 26 850,00 francs et le bilan financier 1997/1998 fait apparaître un total de 7 557,00 francs. Cette constante diminution s'explique peut-être par l'essoufflement du mouvement de solidarité avec l'Algérie et l'épuisement des énergies que la création en 1994 avait suscité.

 

*les dons

Il est très difficile d'apprécier le montant des dons occasionnés par la générosité et l'engagement de la société civile en faveur des démocrates algériens. En effet, quasiment aucune trace n'apparaît dans les archives et les bilans financiers33 . Cependant d'après les témoignages oraux recueillis il est fait état de plusieurs personnes qui versaient en 1994 ou 1995 jusqu'à 2 000 francs par mois. Ces hommes et ces femmes, par leurs participations financières anonymes et désintéressées ont marqué leur engagement en faveur des exilés et ont permis à Ayda de développer son activité.

La lecture du numéro 2 d'Asma fait ainsi apparaître une de ces belles histoires sous le titre " Ayant fêté mon départ à la retraite… " : " J'ai lu dans une information CFDT, une sollicitation à soutenir Ayda. J'ai voulu savoir qui vous êtes, donc j'ai assisté à votre assemblée générale du 18 octobre. J'ai eu le plaisir d'apprécier votre démarche et votre équipe. Maintenant, je souhaite recevoir un abonnement d'un an à Asma après un versement de soutien. Ayant fêté mon départ à la retraite cette année avec de nombreux parents et amis, je leur ai demandé de ne me faire aucun cadeau, mais de me verser l'équivalent, que je reverserai à mon tour à des organisations humanitaires de mon choix. Voici donc une partie de leur générosité à mon égard. Vous en ferez, j'en suis certain, un usage qui me convient parfaitement. Recevez mes sincères amitiés34 . " Cet exemple de dons en faveur d'Ayda illustre ainsi ce courant de sympathie et de générosité qui s'est développé dans la société civile.

Lors d'un compte rendu de réunion, dans le cahier prévu à cet effet, on apprend qu'un des membres d'Ayda ayant reçu un héritage voulait en faire bénéficier l'association35 .

Les dons ont pu être effectués par des artistes reversant l'intégralité ou une partie de la recette de leur spectacle au profit d'Ayda. Cette générosité s'est traduite de plusieurs manières. Le cinéma Utopia a, au cours de ces trois années (1995/1997), versé l'intégralité d'une recette de séance à Ayda tous les mois. Ainsi ces montants s'élevèrent pour 1995 à 13 098 francs et pour 1996 à 20 574 francs36 . Le groupe toulousain Zebda a organisé plusieurs manifestations musicales dont deux soirées concerts les 21 et 22 décembre 1996 qui ont rapporté à Ayda 2 000 francs37 . Le comédien Philippe Caubère, lors du festival d'Avignon en 1995, a reversé l'intégralité de son cachet à l'association, qui s'élevait à 60 000 francs. Il en est de même du pianiste Hakim Bentchouala-Golobitch qui a donné un récital au Théâtre Sorano en avril 1995 au profit des exilés algériens. Ces marques de solidarité ont permis à Ayda de poursuivre son combat. Mohamed Bahrour y fait référence en ces termes : " Et c'est grâce à ces élans de générosité qu'on a tenu, qu'on a été correctement appuyé, et surtout qu'on a pu exprimer notre avis, exprimer nos positions, exprimer notre sensibilité, ce qu'on pensait de la situation en Algérie puis continuer quelque part notre combat en France. "

Afin de se procurer l'argent nécessaire à son fonctionnement, Ayda a du aussi organiser des manifestations avec entrées payantes. Ces recettes ont constitué une part importante du budget de l'association au cours des premières années. Par exemple lors de l'hommage réalisé pour Mohammed Amzert à la FOL en juin 1995, une participation minimum de 20 francs permettait de soutenir la lutte des exilés. La réunion publique organisée le 15 mars 1996 a été aussi l'occasion de recueillir des fonds. Une participation de 20 francs minimum avait été demandée. Ces entrées payantes (exceptées pour les réfugiés algériens), la vente de boissons et de gâteaux, mais aussi la tenue de stand ont permis à Ayda de recueillir des sommes conséquentes. En 1994/1995 71 032 francs ont été réunis par ses activités, en 1995/1996 le montant est de 16 886,50 francs et en 1996/1997 de 3 456. Le bilan financier pour 1997/1998 fait apparaître une somme nulle pour ces activités.

 

La vente d'Asma a rapporté entre 1995 et 1996 32 091,50 francs à l'association mais n'a pas permis de réaliser des bénéfices conséquents. Lors d'une soirée intitulée " Guerre d'Algérie, la mémoire enfouie " Ayda avait édité en collaboration avec les anciens du journal " le Libertaire " une brochure qui était vendue au profit de l'association.

Les ressources financières d'Ayda ont été irrégulières d'une année sur l'autre et ont toujours constitué une des principales préoccupations de l'équipe militante. En effet, les rentrées financières leur ouvraient des possibilités d'action et d'échanges qui étaient restreintes pour cause de non-financement. Ces élans de générosité venants d'horizons divers témoignent ainsi des multiples énergies générées par l'existence même d'Ayda et par le désir d'exprimer leur solidarité aux démocrates algérien(ne)s en exil.